Depuis le début de l’année, les marchés financiers sont en baisse marquée avec une accélération récente.
Pourquoi cette baisse ?
L’attaque menée par la Russie contre l’Ukraine continue de faire grimper les matières premières et vient s’ajouter aux pressions inflationnistes accumulées lors de la réouverture des économies post pandémie de Covid.
Cette tendance, initialement perçue comme conjoncturelle, s’annonce désormais pérenne notamment en raison de la prise de conscience de la dépendance vis-à-vis du reste du monde (médicaments, masques, et maintenant énergie) qui conduit à vouloir moins de mondialisation. Cela est aussi cohérent avec la montée en puissance des consciences environnementales : la production locale réduit les émissions.
De plus en plus, clairement coincées entre le marteau et l’enclume, les banques centrales sont contraintes de choisir entre un resserrement monétaire (hausse des taux d’intérêt directeurs) qui provoquerait une récession ou un durcissement pas assez marqué qui permettrait à l’inflation de s’installer durablement à des niveaux élevés.
La semaine dernière la banque centrale européenne a rejoint la Fed en annonçant un changement de politique monétaire durant l’été, suivie cette semaine par les banques centrales suisse et britannique.
Concrètement, le changement d’attitude des banques centrales entraîne un mouvement de hausse des taux d’intérêt. Le rendement des obligations américaines à 10 ans est passé depuis le début de l’année de 1,57% à 3,44%. Son homologue français est passé de 0,19% à 2,30% au moment où nous rédigeons cet article. Le cout de la dette italienne a lui ponctuellement dépassé les 4% avant que Christine Lagarde n’évoque le risque de fragmentation de la zone Euro qui résulte de l’écart de rendement entre la dette allemande et celle des autres pays tout en précisant travailler à des mesures protectrices.
La violente hausse des taux d’intérêt signifie une perte de valeur significative des obligations déjà émises. Plusieurs fonds obligataires sont en repli de plus de 10% depuis le début de l’année.
Cela influence également les marchés d’actions par trois canaux de propagation :
1) la valorisation d’une action repose sur l’actualisation des flux futurs. A flux identiques, plus le taux d’actualisation est élevé, plus la valorisation est faible. Ainsi, toutes choses égales par ailleurs, la remontée des taux se traduit par une baisse des actions.
2) la hausse des taux pourrait freiner l’activité économique voire provoquer une récession et donc réduire les profits. Cela veut dire des flux à actualiser moins importants et donc une valorisation plus faible.
3) le risque de refinancement : au mieux les entreprises qui doivent refinancer leur dette subiront un coût plus élevé et au pire elles ne trouveront pas le refinancement nécessaire
Que faire ?
Marchés obligataires : il nous paraît encore trop tôt pour se positionner en vue de capter du rendement. L’inflation peut encore surprendre à la hausse surtout si les hausses de salaires devaient s’accentuer. En outre, pour les pays les plus endettés, la hausse des taux pourrait réveiller les craintes de faillite car elle renchérit le service de la dette (pour un même montant emprunté, le remboursement est plus élevé) et peut ainsi déstabiliser les budgets. Il nous semble donc préférable de patienter encore avant de saisir des opportunités.
A court terme :
Privilégier les obligations à taux variables qui profiteront de la hausse des taux d’intérêt, les obligations indexées inflation et les obligations à haut rendement à durée courte car le rendement actuariel est attractif dans ce dernier cas.
Marchés d’actions : les craintes de récession ont pris le dessus. Historiquement, les marchés d’actions souffrent dans la première phase de hausse des taux d’intérêt puis affichent un rebond 12 à 18 mois après rassurés par un environnement économique assaini. Certains titres demeurent très chers (notamment au sein des valeurs de croissance américaines). Cependant, au cas par cas, la purge en cours crée des opportunités pour l’investisseur à long terme.
A court terme :
- fractionner les investissements afin de mettre à profit les fortes fluctuations,
- privilégier les valeurs offrant une protection contre l’inflation, peu endettées (les refinancements seront plus difficiles et plus coûteux) et peu dépendantes du cycle économique. On pourra ainsi mentionner les secteurs de la Santé, du Luxe, les petites sociétés plus agiles et souvent leader sur leur marché
- nous apprécions également le secteur lié à la transition énergétique. Depuis 18 mois, il souffre en bourse ce qui l’a ramené à des valorisations plus acceptables et surtout le besoin d’indépendance énergétique souligné par le conflit en Ukraine va renforcer les investissements en production d’énergies vertes et en réduction des besoins (efficacité énergétique des logements, voiture électrique, …)
Matières premières : 4 secteurs sont à différencier. Les matières premières agricoles qui pâtissent de la guerre en Ukraine. Le blé est en hausse de 70% depuis un an. Le secteur de l’énergie avec un pétrole en hausse de 60% depuis un an. Le secteur des métaux industriels qui connait de fortes variations entre la difficulté à produire mais aussi la baisse de la demande due à la fermeture de l’économie chinoise. Et enfin les métaux précieux qui résistent, derniers actifs protégés dans un monde inflationniste, surtout depuis que le bitcoin a prouvé par sa baisse récente qu’il ne serait jamais un actif défensif.
A court terme :
- se diversifier progressivement sur le secteur des matières premières, surtout sur les métaux précieux, les métaux industriels étant plus sensibles à une récession
En conclusion :
Même si la tentation est forte, se montrer patient, agir par petites touches, être sélectif.
Dans ce contexte, nous sommes plus que jamais disponibles pour faire un point d’allocation de vos portefeuilles.